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Consultation sur le don d’organes, de tissus et le consentement présumé

Avis du Collège

01/31/2024

Le Collège des médecins estime que le consentement présumé n’est pas la panacée à l’accroissement des dons et des greffes d’organes.

  • Des lignes directrices doivent être établies et des équipes 24/7 mises en place.
  • Des campagnes devront informer le public de la démarche de don d’organes après le décès et inciter au respect des dernières volontés d’une personne.
  • Pour favoriser son adhésion au consentement présumé, la population devra être consultée

Lisez le mémoire du CMQ sur le sujet.

Le Collège des médecins du Québec (CMQ) a déposé, à la Commission de l’Assemblée nationale sur la santé et les services sociaux, son mémoire dans le cadre de la consultation sur l’instauration de la présomption de consentement en matière de don d’organes ou de tissus. À titre d’ordre professionnel chargé d’assurer au public une médecine de qualité, le Collège juge important de faire entendre sa voix sur une question aussi fondamentale, qui a des répercussions directes sur les chances de survie des personnes en attente d’une transplantation.

Le CMQ est d’avis que le consentement présumé n’est pas la panacée à l’accroissement des dons et greffes d’organes effectués au Québec. Il croit plutôt, à l’instar d’autres juridictions à travers le monde, que c’est un ensemble de mesures d’optimisation qui y contribuera, parmi lesquelles la formation du personnel soignant, l’organisation des soins et l’information du public.

Des effets pervers

Le Collège relate notamment le cas de l’Espagne qui a dû déployer, sur 10 ans, un ensemble de mesures après avoir instauré le consentement présumé en 1979. Le Chili, quant à lui, a vu son taux de dons d’organes chuter à l’implantation de la présomption de consentement, car sa population comprenait mal la portée de la nouvelle loi. Et au Brésil, le gouvernement a dû abandonner le consentement présumé, son implantation ayant donné lieu à un vaste mouvement de protestation.

Les faits semblent démontrer que l’accroissement du bassin de donneurs potentiels qu’induit le consentement présumé ne se traduit pas nécessairement par une augmentation du nombre de dons réels ni par une augmentation systématique du nombre de transplantations. En conséquence, avant d’imiter la Nouvelle-Écosse, première juridiction en Amérique du Nord à avoir instauré la présomption de consentement en 2021, le CMQ invite le gouvernement québécois à d’abord analyser en profondeur les retombées de cette mesure.

L’optimisation des soins et de leur organisation

L’organisation actuelle du réseau de la santé québécois rend incertaine la disponibilité des salles d’opération au moment d’un prélèvement ou d’une transplantation d’organes.

De la compétition entre soignants, pour l’accès à des lits dans les unités de soins intensifs et aux salles de chirurgie, entrave la démarche de prélèvement et de greffe d’organes.

Après le décès, une personne doit en effet être maintenue artificiellement en vie, parfois pendant plusieurs jours, le temps que ses organes soient prélevés et qu’un donneur soit identifié. Des lignes directrices de priorisation des cas doivent être édictées.

Des équipes permanentes et financées

Le Collège suggère que soient mises en place et financées, dans des établissements de santé, des équipes dédiées aux dons et aux transplantations, en mode 24/7, pour prendre en charge les donneurs et fournir tout le soutien nécessaire aux proches et aux familles. Il y a lieu, aussi, de rendre les hôpitaux davantage imputables de signaler les personnes pouvant potentiellement donner leurs organes. Mais il importe que les ressources chargées de ce référencement jouissent d’une certaine indépendance : elles ne peuvent pas être directement impliquées dans les soins dispensés aux patients visés, pour ne pas donner l’impression d’influencer la décision d’une personne ayant réclamé l’aide médicale à mourir, par exemple, ni accélérer le processus de fin de vie dans le but de recueillir ses organes. Santé Québec, la nouvelle structure de gouvernance du réseau, disposerait de l’autorité nécessaire pour y parvenir.

La formation des professionnels de la santé

Le CMQ souligne que des juridictions, comme la France, ont rendu obligatoire auprès du personnel de la santé une formation sur le don d’organes. Elle vise à leur permettre d’identifier efficacement les donneurs, à fournir des explications claires aux familles et des réponses à leurs inquiétudes. Le CMQ recommande une telle formation au personnel concerné.

Un registre unique

Il existe trois façons d’exprimer son consentement au don d’organes ou de tissus au Québec : le Registre de la RAMQ, le Registre de la Chambre des notaires du Québec et l’autocollant à apposer au verso de la carte d’assurance maladie. Les équipes médicales doivent actuellement vérifier auprès de deux registres pour s’assurer des volontés d’une personne décédée, ce qui alourdit le processus et peut, malheureusement, mener à des incohérences dans les volontés exprimées. L’instauration du consentement présumé risquerait même de rendre l’exercice plus problématique encore. Le CMQ estime que l’enregistrement ou la modification de consentement au don d’organes ou de tissus doit être beaucoup simplifié. Cette procédure simplifiée doit aussi être largement médiatisée.

Davantage d’information au public

En parallèle, le CMQ croit essentiel qu’un effort de sensibilisation soit déployé auprès du public. Il est important d’indiquer à ses proches ses volontés en matière de dons d’organes ou de tissus au décès, sans quoi un veto de leur part fait obstacle à l’équipe médicale. Pour favoriser le respect des volontés exprimées et pour faciliter la communication avec les proches, le Collège des médecins est d’avis que des outils facilitateurs gagneraient à être élaborés.

Des mythes subsistent en matière de don d’organes ou de tissus : certaines personnes croient le prélèvement d’organes ou de tissus incompatible avec l’exposition du défunt au salon funéraire, alors que d’autres redoutent que le consentement au don accélère l’abandon des soins.

En Ontario ou au Royaume-Uni, des mesures gouvernementales obligent la tenue d’importantes campagnes d’information annuelles à l’égard du grand public.

« La présomption de consentement est une question délicate et sensible, qui soulève des enjeux éthiques et qui doit reposer sur un large consensus populationnel. Il en va d’ailleurs des valeurs de respect, de rigueur et d’intégrité par lesquelles la mission du Collège des médecins est portée. Pour accroître significativement le taux de dons et le pourcentage de greffes, il faudra optimiser les processus, mieux former les soignants et informer le public », soutient le Dr Mauril Gaudreault, président du CMQ.

Le mémoire du Collège des médecins du Québec est accessible ici.

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